Blanche est ma Rose
Note: Ils
ne m'appartiennent pas, mais je suis une grande romantique et sentimentale.
Ce n'est qu'une modeste contribution sans pretention, ne m'en voulez pas
trop. Si vous avez des questions ou vous vous proposez pour reparer
mes erreurs (ces histoires ne sont pas relues, c'est ma faute...), laissez-moi
un message.
Encore une fois, merci a Morgane, qui m'a décidée a aller
fouiller dans mes greniers. C'est la ou j'ai trouve cette (vieille)
histoire... C'est la toute premiere que j'aie jamais ecrite... soyez
gentils avec moi, ca revent de loin!!!!!
I. UNE LETTRE
D'ADIEU?
Elle n'avait d'ailleurs jamais
entendu parler d'amis en Ardeche. Relevant la tête, elle chercha
vaguement Grand-mère du regard. Celle-ci n'était nulle
part ou elle pouvait être trouvée de bon matin, et la maison
semblait si silencieuse sans sa bonne humeur et son entrain communicatif.
"Elle a du recevoir une lettre
similaire" se dit Oscar, et son coeur se serra davantage.
Comment osait-il faire souffrir
Grand-mère? Comment osait-il la faire souffrir, elle?
Et puis elle comprit que sa douleur n'était rien en comparaison
de ce qu' André pouvait éprouver, et qu'en révélant
son coeur, ce compagnon silencieux, cet être doux qui avait renoncer
sa propre vie pour être a ses cotes, ce coeur immense qu'elle n'avait
pas vu, jour après jour, se remplir d'amour pour elle, ce coeur
venait finalement de se briser.
Elle relisait les mots tortures
de sa lettre:
"Il ne peut pas se pardonner"
"Il ne m'a jamais parle de
famille ou d'amis en Ardeche"
"ma douleur... mon fardeau...
j'aurais du trahir mon coeur plutôt que de blesser le tien..."
Mon Dieu! André!
Des images se bousculèrent
dans sa tête… Le regard dur qu’elle lui avait lance, en lui
disant qu’elle ne requerrait dorénavant plus ses services, lorsqu’e
elle était venue le trouver a l’ écurie:
“- Tu es libre de faire ce que
bon te semble, a présent, tu n’' as plus besoin de t’ occuper de
moi!”.
Le plus ironique, c’ était
qu’elle voulait ces paroles d' être bel-et-bien rassurantes.
Comment ne pouvait-elle pas lui pardonner ses actes de la nuit précédentes?
Elle savait bien, elle, la douleur d’' un amour brûlant. Elle
avait eu peur, pourtant, parce que l’ amour d’ André était
un brasier, et, sans y penser, n’ avait-elle pas peur de s’ y consumer
elle-aussi? Elle connaissait le feu, et l’ ampleur des sentiments
d’' André l’avait pourtant impressionnée. A ce moment-la,
cela n’ avait fait que confirmer ses pensées..
Comment pouvait-elle vivre en
tant que femme, dans ce brasier de sentiments? Sa décision
était prise, elle resterait un homme, elle risquerait sa vie, mais
son coeur serait sauf. Ce serait beaucoup plus facile…
Ce tragique matin-la, avant
de lui faire part de sa decision, elle avait interpelle son compagnon.
Mais André n'avait pas répondu pas, il baissait les yeux
pour une seconde. Quand il rencontra a nouveau son regard, elle avait
réalise que peut-être, ceci était le dernier moment
de leur vie commune. Lorsqu’ André était arrive au
château, c’ était un gamin aux cheveux en bataille.
Maintenant, c’ était un homme qui lui aussi avait pris sa décision.
Oscar étouffa une larme et sortit de l’ écurie a pas rapides.
Elle se réveilla tôt
le lendemain. Personne n’ avait pris soin de la réveiller
ni de préparer son nouvel uniforme, comme de coutume. Si mademoiselle
avait besoin d’' être prête pour une fonction de bon matin,
Grand-mère l’' aurait bien réveillée avant l’aube
“au cas ou”…
Mais le seul indice de la présence
de la femme âgée étaient dans le bruit incessant de
ses pas rapides au rez-de-chaussée. Le thé n’était
pas prêt, Oscar ne pouvait sentir aucune des odeurs habituelles du
petit-déjeuner. Mais elle pouvait entendre Grand-mère
se lamenter: “Non, non…” distinctement a présent.
Lorqu’' elle atteint la dernière
marche, elle trouva celle-ci passant le couloir a pas rapides, les cheveux
défaits et un morceau de papier a la main. Elle avait les
yeux humides, et elle s’' arrêta a peine une seconde en face d’'
Oscar.
“- Mon enfant”. Dit-elle
seulement, et elle fourragea dans sa poche pour y extraire une pièce
de papier identique et la tendit a Oscar. Celle-ci la saisit, et
Grand-mère se dirigea vers la porte et disparut, laissant Oscar
dans un silence désagréable.
Elle prit la lettre, puisque
c’' était une lettre que Grand-mère lui avait remise, et
fixa les deux seuls mots sur le cote pile du papier. Une écriture
petite et serrée; elle reconnut la manière précise
qu' utilisait André.
“Pour Oscar”.
Elle se demanda si elle voulait
aller plus loin. Quelque-chose la poussa, pourtant, a retourner et
déplier le papier. Le message n’ était guère
long:
“Mon Oscar, puisque ceci est
la première et la dernière fois que j’ ose t’ appeler comme
mienne, Puisque tu ne seras jamais a moi, je n’ aurais que la terre.
J’ ai des amis en ardeche, et ils prendront soin de moi, m’ apprendront
a prendre soin de la terre, pour qu’ un jour elle soi mienne, comme tu
ne le seras jamais.
N’' ai crainte, mon Oscar, et
si je ne peux vivre sans toi, je ne peux vivre avec ton ombre, et c’'est
ce que j’' ai fait de toi, et la décision que tu as prise a éteint
a tout jamais ton feu. Puisque tu n’' es plus la, je ne puis plus
te servir.
Je n’' ai jamais rien possède
ni rien eu a t’' offrir sinon mon coeur, et s’' il souffre, je sais au
moins que j’' ai toujours un coeur. Oscar, tu ne peux pas être
ce que tu n’' es pas.
Adieu, mon Oscar, et ne pense
pas que tu m’' aies rendu malheureux. Peu de gens connaissent un
tel amour, et moi, je le connais. Je souffre mais je vis. Vis
Oscar, même sans moi, garde ton étincelle!”
“- Grand-mère!
Appela-t-elle lorsqu’' elle sortit dans la cours. Votre lettre, que
dit-elle?
- Ma pauvre enfant, elle dit
comme celle de votre père. Mon pauvre André, je pense
qu’' il a perdu la raison. Il s’' excuse pour avoir vécu ici,
vous remercie tous pour l’' hospitalité, mais il ne reviendra jamais…
Mademoiselle Oscar?
- Err… la mienne aussi.
A-t-il des amis en Ardeche?
- Ma chère enfant, il
est toujours après vous, j’' imagine que vous devriez savoir mieux
que moi.
- Je suis désolée,
Grand-mère, je ne pensais pas vous blesser. Seulement, il
me dis qu’' il part travailler la terre en Ardeche, mais ca n’' a pas de
sens.
- Il est parti… mon André
est parti…”
Et la façon don’t elle
l’' annonça fit frissonner Oscar. Qui aurait pu croire que
derrière cette façade de patience et de douceur brûlait
un tel feu?
“- Trop tard, André,
je t’' ai connu trop tard”
Et elle laissa rouler une larme
qu’elle avait tente de retenir depuis trop longtemps.
II. LA SUEUR
Cela l'avait toujours intrigue,
le contraste entre la nature douce et silencieuse d'Andre et sa musculature
de fer. D'ordinaire, dissimule sous sa chemise et sa livree, cela
n'etait pas autant apparent. Maintenant, en le regardant au soleil,
il lui semblait le redecouvrir. Elle savait qu'elle le fixait, mais
elle ne se sentait que vaguement embarrassee, et fascinee, comme un papillon
captive par la flamme.
Andre sentait son regard comme
un fer rouge sur sa peau. Il savait qu'il se presentait, peut-etre
pour la premiere fois, de la facon la plus primale et sincere qu'il lui
etait possible, bien loin des atours et des jeux de cache-cache du chateau.
Mais se sentir denude devant celle qui enflammait son coeur. "Celle
qui a fait tout ce trajet parce qu'elle etait inquiete pour moi!".
Cette pensee lui redonna confiance et il redoubla ses efforts. "Elle
est toujours concerne, elle ne m'a pas chasse de ses pensees... Mais
comme elle pousse ses responsabilites!". Ceci le fit sourire, un
petit sourire de chat dans un endroit chaud et confortable. Oscar
remarqua ce sourire felin et
se demanda ce qui se passait dans sa tete. Elle essaya la diversion:
"- Tu sais, Andre, je ne te
voyais pas du tout en fermier!
- Il n'y a pas beaucoup d'autres
avenues..."
("pour les gens comme moi, qui
ne sont pas nobles")
Il aurait pu graver ces mots
sur la peau tendre d'Oscar. Ne pas dire ces mots, et laisser suspendu
dans l'air qu'elle l'avait chasse de ce qu'il avait connu toute sa vie,
lui fit autant de mal que si il les avait lance a sa tete.
"Oscar aura entendu ces mots"
Pensa-t-il. Et il se souvint de la furie qui l'avait pris la derniere
fois. Il avait bu, mais ce n'etait pas une excuse. Il etait
en colere contre le monde entier, mais plus encore contre lui-meme, mais
avant de pouvoir dire quelque-chose pour chasser le silence pesant, Oscar
brisa la tension, le sauvant encore une fois ("Comme toujours, mon Oscar")
"- Mais je dois avouer que tu
as toujours aime les terres pres du chateau, et tu as toujours su t'occuper
des betes...
- C'est vrai, mais je n'avais
pas trop le choix"
Pourquoi avait-il dit ca?
Oscar venait juste de lui tendre la main, et il venait encore de la mordre.
Se maudissant, et voyant son expression de peine, il continua:
"- Au debut, du moins.
Oscar, tu sais comme moi que l'on ne peut pas me forcer a faire quelque-chose
que je ne voudrais pas."
("Mais tu ferais tout pour moi"
Pensa Oscar, et elle n'etait pas sure si cette pensee l'effrayait ou si
elle lui rechauffait le coeur. "Je ne devrais pas etre aussi
sentimentale, je ne suis plus une enfant!").
Mais, malgre elle, ses joues
s'empourprerent.
Andre, se sentait coupable d'avoir
assombrit l'humeur d'Oscar lorsqu'elle essayait de s'adapter a une situation
a laquelle, apres tout, elle n'etait pas familiere. Comment osait-il
lui faire la morale, quand il avait abuse de sa force brutale cette nuit
fatale?
"- Bon, Oscar, tu vas me regarder
toute la journee ou tu envisages de m'aider a labourer? Si tu ne
veux pas trop de salir, tu peux toujours encourager les boeufs!"
Oscar, 'encourager les boeufs'!
C'etait bien la meilleure!
Et aussi sur, Oscar s'etait
leve d'un bond.
"- Et tu crois que j'ai peur
de me salir? Tu veux me voir tirer des boeufs?"
Sur cela, elle marcha droit
vers Andre et lui pris le ratellier de la charue des mains. Andre
la repoussa de l'epaule, et elle lacha la lourde piece de metal.
Elle l'empoigna comme elle avait fait tant de fois lorsqu'ils etaient enfants,
feignant de l'etrangler, et reussit a le propulser 10 pieds en arriere.
Il se rapprocha, se baissant lors des derniers pas, et ramassa une poignee
de terre retournee qu'il lanca a la hauteur de ses epaules, il ne voulait
pas, apres tout, la blesser ou l'aveugler. Au lieu de s'indigner
("C'est Oscar, apres tout, ce n'est pas comme si tu te battais dans la
boue avec une de ces demoiselles soignees de la Cour"), elle s'empressa
de prendre de la terre a pleine main, se moquant bien que son uniforme
impeccable etait maintenant souille, et riposta.
Avant qu'ils ne puissent s'en
rendre compte, ils se battaient au poing, etales dans la boue, la charrue
longtemps oubliee, les boeufs continuant leur route nonchalament, ne se
preocupant pas du fait que la charrue offrait a present beaucoup moins
de resistance a la terre.
Apres s'etre arreter de rire
comme des enfants, ils se leverent peniblement, le coeur leger.
"- Oh, Andre, je n'avais pas
ri comme cela depuis bien trop longtemps, mais regarde-toi! Tu es
si... drole!
- On voit bien que tu ne peux
pas voir ce a quoi tu ressembles. Je crois que ton uniforme est definitivement
gache.
- Ne t'en fais-pas, cela en
valait bien la peine. De plus, j'ai encore gagne, cela me rappelle
les temps passes! Mais toi, tu as l'air..."
Elle ne put continuer tellement
elle riait. Ce n'etait pas un rire doux ou retenu non plus, c'eatit
un rire franc et libre, qui semblait monter au ciel. Cela rechauffa
le coeur d'Andre et declencha ses eclats de rire. Ils resterent comme
cela de longues minutes, inspectant leurs vetements souilles et leurs visages
taches de boues, riant de tout coeur.
Ils passerent les minutes suivantes
a attraper les boeufs, courant en plein champ, les ramenant vers la ferme.
Apres avoir deteller la charrue, ils se sentaient plus calmes, mais aussi
plus glaces. Le vent s'etait leve, et les vetements humides leur
collaient au corps.
"- Je crois que nous ferions
mieux de nous nettoyer un peu!" declara Andre, un sourire aux levres.
Ils se dirigerent vers le puys,
Andre attarpa le baquet, remonta l'eau, et commenca a se frotter les mains
et la figure.
Comme ils essayaient de se rentre
plus presentable, et reduire l'odeur les enveloppant, Jeannette passait
dans la cour et accourut:
"- Et bien, Andre, quand tu
dit que tu vas y mettre la main, tu y vas vraiment avec le coeur" dit elle
avec moquerie mais un franc sourire.
Oscar sourit quelque peu.
"Comme elle me rappelle Grand-mere", songea-t-elle.
"- Bien, vous feriez mieux de
venir a l'interieur tous les deux avant d'attrapper la misere! Il
y a une bassine, vous pourrez vous laver, mais ne restez pas dans ces vetements
mouilles, ce n'est pas sain!
- Tu es pire que ma Grand-mere,
Jeannette!
- Pauvre femme, si elle a affaire
a toi! Mais je veux pas que vous attrapiez un froid, si vous devez
nous aider a labourer cette semaine!"
Andre sourit a la remarque,
mais il posa la main sur l'epaule d'Oscar et la dirigea vers la porte de
la petite ferme.
Le feu etait allume dans la
piece centrale, et pres de la porte, dans la petite piece qui servait de
cuisine, il y avait en effet un seau d'eau claire, qui se rechauffait quelque
peu.
"- Oscar, as-tu amene d'autres
vetements que ceux que tu portes? Je ne pense pas t'avoir vu emporter
de bagages. J'ai une chemise ou deux qui pourraient t'aller, je ne
suis pas sur du reste.
- Ne vous en faites donc pas
mes enfants, interrompit Jeanette qui les avait suivit dans la cuisine.
J'ai de vielles robes que je ne peux plus porter, apres mes onze enfants,
j'esperait les donner a mes filles, mais elles vivent bien trop loin a
present, et je n'ai pas la sante de faire ce voyage. Ce n'est pas
grand-chose, mais je pense qu'une ou deux vous iraient. C'est toujours
mieux que de rester trempee!"
Oscar regarda dans la direction
d'Andre. Il fixait le feu dans l'autre piece.
"- Ma foi, dit-elle en se levant,
je crois qu'il vaut mieux que je porte quelque-chose dans ma taille, alors.
Merci pour les chemises, Andre, mais voyant la facon dont Martin et Jeanette
ont l'intention de t'epuiser, je pense que bientot, tu en auras plus besoin
que moi!
- Bien, alors c'est regle.
Ne bougez pas et essayez un peu d'enlever cette boue, vous sentez plus
que les cochons!"
Sur cela, elle quitta la piece.
Andre avait termine avec le bassin et Oscar commenca a se frotter le visage.
"-Tu leur a parle de moi..."
Ce n'etait pas une question,
juste une remarque, qui la laissait vaguement songeuse. Andre n'avait
pas a repondre. Pourtant, il le fit, d'une voix a peine perceptible:
"- Oui. Je leur parle
toujours de ceux qui me sont chers."
Elle tourna vivement la tete
pour le regarder intensement. Jeannette passait le pas de la porte
a ce moment-la, une pile de tissus indefinissables sous le bras.
Le bleu passe dominait toutes
les teintes. Oscar devinait que ces vetements etaient probablement
les moins abimes qu'elle possedait, et elle se sentait a la fois legerement
peinee et anxieuse. Elle avait bien decide qu'elle porterait une
robe, pourtant!
"-Je vais me sentir deguisee"
se dit-elle
Andre avait observe les emotions
passer sur son visage, mais il resta silencieux, un petit sourire triste
sur ses levres. Finalement, il se leva et sortit de la petite piece.
Quand il reparut, elle avait
revêtu les atours remis par Janette et se dressait au milieu de la
cuisine avec un air a la fois contrit, ravis, et juste a peine anxieuse.
Mais André ne dit rien pour quelques instants. Pourtant, il
la dévorait des yeux. Une seule fois avait-il pu distinguer
les traits féminins d'Oscar dans une robe, et il essayait justement
d'oublier cet instance qui était un des éléments qui
lui avait fait perdre contrôle. Pourtant, il savait qu'Oscar
serait très belle. Peut-être même trop désirable,
dans sa condition de femme étalée de la sorte devant lui,
et il ne pouvait risquer un geste ou une parole malheureuse. Aussi
ne dit-il rien, mais la vision devant lui, lui avait coupe la parole même
s'il avait souhaite dire un mot.
Oscar, quant-a elle, jugeant
de l'effet de son "déguisement" sur le jeune homme, le prit pour
un bon signe et son visage s'épanouit quelque peu. La robe
fanée flattait pourtant de sa couleur passée l'éclat
de ses yeux et la délicatesse de sa peau semblait accentuée
par l'étoffe épaisse. Le caracco marron fonce lui enserrait
bien la taille qu'elle avait délicate, et la robe bleue semblait
flotter autour de ses longues jambes. En haut, on devinait sous la
taille les hanches cambrées et fermes qui maintenaient la jupe en
place. Elle était en effet plus grande que Janette et la robe
lui montait sur le bas des jarrets, mais cela la rendait plus ingénue,
et, aux yeux d'André, plus désirable encore.
Oscar se rendait bien compte
que cet accoutrement la rendait vulnérable. D'une part parce
que c'était la marque de son sexe et elle n'y était certes
pas habituée. De plus, il n'était guère facile
de courir ou galoper dans de pareils atours! Mais l'étoffe
râpeuse lui rappelait aussi qu'elle avait passe les vêtements
d'une classe sociale plus démunie, et elle ne savait pas trop si
elle n'avait pas l'air ridicule de la sorte.
André semblait lire dans
ses pensées, et il troubla le silence établi:
"- Vois-tu, malgré ces
vêtements modestes, ma chère Oscar, ton allure est aussi noble
qu'elle l'a toujours été. Tu peux faire illusion pour
quelques minutes, mais on voit bien a t'observer de plus près que
ce ne sont pas les apprêts qui te conviennent. Ceci dit,
la transformation semble très réussie. Au moins, tu
n'as plus froid?
- Non non, fit-elle d'une voix
un peu énervée (Comment diantre parvient-il toujours a deviner
ce qui me préoccupe?). Il me faudra un peu de temps pour que
je m'habitue!"
Et sur ce, elle fit quelques
pas dans le crissement de l'étoffe, en parut un peu mécontente
et fronça les sourcils, ce qui amusa fortement André, qui
la regardait faire avec un brin de commisération dans le regard.
Janette réapparut enfin
et s'extasia devant Oscar, qui la regardait d'un air ferme, comme si elle
se devait, maintenant dépourvue de sa tenue vestimentaire, de prouver
son caractère de nouveau. Le regard nostalgique de la fermière
l'arrêta pourtant:
"- Comme vous êtes jolie!
Je m'excuse de l'état de ces oripeaux, j'aurais peut-être
du m'en débarrasser, mais on ne sait jamais! En tout
cas, je suis ravie qu'ils vous aillent de la sorte. (Petit regard
en direction d'André, qui ne cachait plus son admiration)
D'ailleurs ce gredin d'André vous trouve charmante, n'est-ce pas,
André? (Acquiescement de la tête). Ah, quand j'avais
votre âge... Cette robe me rappelle de bon souvenir. Attendez
que Martin vous voie!!!!"
Justement, Martin venait lui
aussi d'entrer dans la pièce. Il fixa Oscar avec un air ébahi:
-"Ah ca! Ah ca alors!"
Oscar avait baisse la tête
devant l'assaut des compliments, mais Martin ne semblait pas percevoir
sa gène:
"- Et bien Janette, c'est comme
toi les premières années de notre mariage. D'ailleurs
tu portais cette robe les premiers temps que nous nous étions installes
ici! Je me souviens! C'est que vous lui ressemblez drôlement
a ma Janette, mademoiselle!
- Allez, Martin, nous allons
arrêter de les embêter, ces enfants! Viens donc m'aider
a faire la soupe. André, ce sera prêt dans une heure,
d'accord?
- Merci beaucoup!" fit
André, l'air amuse de voir de la sorte Janette tirer son époux
littéralement hors de la pièce.
Oscar tira une chaise et s'assit
dessus, maintenant d'une main les pans encombrant de sa jupe. Elle
semblait fixer le sol, mais sa voix résonna clairement dans le nouveau
silence.
"- Je ne regrette pas d'être
venue, André. Je voulais te le dire. Ardeche ou Normandie,
j'avais besoin de m'éloigner un peu de tout. Mais j'avais
peur...
- Peur, toi, Oscar?
- Oui, peur pour toi."
Elle le regardait franchement
a présent et ce fut au tour d'André de baisser les yeux.
"- Il n'y avait pas de quoi,
tu vois bien que tout va bien.
- Certes, oui, mais après
avoir lu ta lettre... je me suis dit... alors je suis partie a ta
recherche. Grand-mère ne connaissait pas d'amis en Ardeche,
mais elle connaissait Maître Raubin. Il m'a dit qu'il savait
ou tu passais ton temps étant plus jeune. mais que les fermiers
avaient déménagé en Ardeche, justement. Après,
retrouver Martin et Janette a été plus facile.
- Je ne voulais pas te causer
tous ces ennuis. C'est d'ailleurs pour cela que je n'avais pas laisse
d'adresse. J'avais besoin de vacances moi aussi. Je suis désolé.
Vraiment. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne sais faire que du mal,
ces temps-ci..."
Oscar ferma les yeux, devant
l'aveu d'André, lui rappelant le souvenir douloureux de sa déclaration.
"- Oscar? Tu sais, je
te suis d'autant plus redevable que...
- Que?
- ... non, rien, j'ai du oublier.
Je te remercie de te faire du souci pour moi malgré tout."
André avait pris son
visage entre ses mains. Il entendit a peine le froissement des vêtements
lorsqu'Oscar se leva de sa chaise, mais il sentit des mains décidée
lui écarter les siennes et un doigt déterminé lui
soulever le menton. Il se trouva face a un visage de glace dont les
yeux le transperçaient, mais ces yeux brillaient d'un feu et il
n'aurait pu dire si c'était de la colère, de la haine ou
de l'amour. Mais Oscar parla lentement, très lentement, d'une
voix ferme qui contenait difficilement son emportement:
"- Maintenant, ca suffit et
tu vas m'écouter. Je ne veux pas que ce qui s'est passe ne
te pousse a commettre un acte irréparable. Tu m'entends?
Je t'interdis de faire une telle bêtise. Que crois-tu que cela
va me faire? Me sentir responsable? Est-ce ce que tu veux?
Tu veux me faire souffrir par ta mort? Crois-tu que je ne ressens
rien a ton égard, que toutes ces années ne signifient rien
pour moi? Que je puisse te voir te détruire sans battre un
cil lorsque je sais que j'en suis responsable? Alors, tu vas me dire:
que comptais-tu faire?"
Comment mentir devant ce coeur
de braise. André se sentait consumé. Consumé
de honte devant la splendeur de cette dignité, de cette sorte d'amour,
aussi, qu'il connaissait mais qu'il avait choisit d'ignorer, parce que
ce ne serait alors pas aussi facile de...
"- Je ne peux pas vivre sans
toi. Je préfère ne pas vivre du tout. Je ne voulais
pas te blesser, alors j'ai du partir. Quand tu es loin, il y a quelque
chose qui est déjà mort en moi, alors ca n'avait plus d'importance.
Mais j'avais promis, tu sais, j'avais promis a Martin et Janette que je
les aiderais. Quelque soit ma décision, je tiens toujours
mes promesses..."
Oscar lui maintenait toujours
le visage, mais il sentait ses doigts trembler. Il sentait aussi
la goutte traîtresse de ses larmes s'échapper des confins
de son oeil droit, et rouler jusqu'a la peau d'Oscar, qui lâcha son
visage comme brûlée par le liquide.
André avait garde son
regard plantée sur elle, et il ne craignait plus a présent
de lui montrer son malheur comme le flot de ses larmes coulaient en creusant
des sillons brillant le long de ses joues.
Oscar lui tournait le dos.
Il voyait bien trembler ses épaules. Il aurait voulu se jeter
contre elle et la serrer très fort, sentir sa tête contre
sa poitrine, apaiser le torrent d'émotions qui enserrait son coeur,
l'étreindre comme un noyé étreint son sauveteur.
Mais il n'en fit rien, sachant qu'il serait rejette.
"- Je te promets, Oscar, tout
cela, c'est fini. Plus maintenant. Plus après que tu
aies fait ce voyage pour me retrouver. Je t'ai fait trop de mal.
Si je le dois, je vivrai avec l'ombre de moi-même."
Il se leva a son tour et sortit
de la pièce.
Plus tard, bien plus tard, Oscar
n'avait toujours pas bouge de la pièce, mais elle s'affairait sur
un instrument de couture dont les rouages demandaient correction et André
la trouva presque a quatre pattes sous la table. Elle se redressa
précipitamment au son de ses pas.
"- Amis? Fit-il en offrant
un large sourire
- Amis, conclut-elle en redressant
la tête. D'ailleurs, tu vas m'aider a tenir cette roue pendant
que je la graisse."
Le reste de la conversation
fut anime et presque enjoué.
Il rejoignirent Janette et Martin
déjà attable autour d'une grande table, sans doute assez
large pour accueillir de nombreux enfants. Ils s'assirent chacun
de leur cote, derrière les assiettes déjà disposées
sur la table. Janette les servit de bon coeur un liquide épais
et garnis de petits morceaux de viande.
- "Je m'excuse du modeste repas,
avait-elle dit, mais c'est tout ce que je pouvais acheter au marche ce
matin, et je ne savais pas que vous nous rejoindriez, Mademoiselle"
Oscar se mordit la lèvre
avant de répondre:
"- Ceci m'a l'air succulent,
je vous remercie. Il ne faut pas que vous fassiez des efforts pour
moi, c'est justement moi qui m'excuse de m'imposer de la sorte!
- Mais non, tous les amis d'André
sont nos amis, alors profitez! Si nous le pouvons, nous ferons tout
pour vous être agréables! Allez, mangez avant que cela
ne refroidisse!
- Je vous remercie", fit Oscar
d'une voix étranglée.
André regardait droit
devant lui et évitait de rencontrer son regard.
Enfin, après le frugal
repas, Janette refusa a grand cris de les laisser partager la tache de
la vaisselle, arguant qu'ils avaient déjà assez travaille
aux champs dans la journée, et les envoya se préparer pour
la nuit, alors que Martin disparaissait pour la nuit sans demander son
reste et surtout en vue d'éviter la corvée.
André mena Oscar dans
une petite chambre, dont le modeste mobilier comptait pourtant un immense
lit qui aurait pu servir pour au moins 4 personnes. Le matelas ne
semblait guère bon, mais il y avait de chaudes couvertures et cela
semblait l'essentiel. Ils s'assirent tous les deux cote a cote sur
le dessus du lit.
"- Pour le coucher, fit André
d'une petite voix, je crains que nous n'ayons qu'un grand lit. C'est
la ou j'ai passe mes premières nuits. C'était celui
des enfants, alors il est vaste a souhait! Mais ca ne m'ennuie pas
de coucher dans la grange ou l'écurie, je le fais assez de toute
façon. Ainsi, tu pourras mieux profiter de ton sommeil.
Je me sens un peu coupable de t'avoir tant fatiguée de la sorte...
"- Non! Je veux dire,
non, n'en fait rien, s'il te plaît, André. J'ai un peu
froid, et puis j'ai surtout besoin de compagnie... Enfin, je suis
en vacances après tout. Cela me rappellera quand nous étions
enfants!"
André avait jeté
un coup d'oeil amuse a sa compagne. D'ordinaire, elle n'aurait sans
doute pas admis avoir besoin de sa compagnie, mais tellement de choses
avaient change! D'ailleurs, il préférait largement
le vaste lit a l'idée de dormir par ce temps dans le foin.
"Oui, dit-il, nous passions
notre temps a venir dans la chambre de l'un ou de l'autre. D'ailleurs
j'en ai reçu plusieurs remontrances de la part de Grand-mère...
- Je me souviens surtout que
tu venais me retrouver dans ma chambre ces fameux soirs d'orage... peureux!
Fit Oscar d'une voix légère.
- Je l'admet! Mais je
n'ai jamais trop aime les éclairs, et puis... je ne me souviens
plus très bien a présent, mais ma mère est morte...
une nuit d'orage", avait ajoute André d'une voix mal assurée.
Oscar s'était rapproche
de lui et avait glisse sa main sur son épaule.
"-Je sais." Dit-elle
simplement. Elle ne parut pas surprise quand la main du jeune homme
vint se poser sur la sienne.
"-Des fois, Oscar, je voudrais
bien redevenir un enfant. Tout me semblait si clair a l'époque!
-Oui, je dois l'avouer, c'est
très tentant... Mais cela ne sert a rien d'avoir des regrets!
- Oh, mais je n'ai... vraiment
aucun regret, dit André d'une voix mal assurée
- C'est vrai, et puis nous
pouvons toujours faire ce que nous faisions a l'époque! D'ailleurs,
je suis fourbue, et je voudrais bien me coucher.
- La vie au grand air!
Je vais te laisser te préparer. J'ai besoin de me passer un
coup d'eau sur le visage. Ne t'en fais donc pas, je dormirai
sur les couvertures. Je n'ai pas froid, après tous les efforts
de la journée!"
Il se leva gaillardement, fit
quelques pas pour chercher un vêtement dans une pile mal ordonnée
sur la commode, jeta un dernier coup d'oeil sur Oscar qui le regardait
a demi anxieuse, a demi rêveuse. Ses yeux trahissaient une
extrême curiosité, ce feu qui l'avait toujours fascine, mais
son visage trahissait sa fatigue, et il poussa la porte pour la laisser
seule a ses préparations pour la nuit.
Quand il revint dans la pièce,
vêtu simplement d'un pantalon de nuit, la petite chandelle de la
table de nuit était proche de sa fin, et Oscar reposait du cote
gauche du lit, enfouie sous les couvertures. Il pouvait voir le linge
blanc d'une chemise de nuit qu'il avait mainte fois vu Grand-mère
laver avec soin. Blottie au fond du lit, enroulée dans les
couvertures, ses cheveux reposant comme un éventail d'or sur le
modeste
oreiller gris, il eut une vision
de sa beauté endormie et se dit qu'il ne pourrait jamais quitter
du regard ce spectacle inouï. Elle dormait paisiblement, et
cela raccommodait son coeur blesse. Il ne l'avait pas encore abîmée.
Elle restait pure et fraîche... et immobile, dans un sommeil que
même ses gestes impardonnables n'avaient pas réussi a troubler.
Ce fut le crachotement final
de la chandelle, la fumée noire et l'odeur âcre, et enfin
l'obscurité qui l'arrachèrent a sa contemplation. Alors,
délicatement, il alla se glisser tout a fait a l'autre extrémité
du grand lit, en prenant soin de ne pas l'approcher de peur de troubler
ses rêves... et aussi se sentant indigne de toucher cet être
formidable qui lui avait donne une autre chance de partager son existence,
ne serait-ce que pour ces courts instants bénis.
Il s'endormit pourtant tout
de suite, rêvant de son amazone, un sourire flottant sur ses lèvres,
comme il ne l'avait plus fait depuis bien longtemps.
A Suivre...
Berusaiyu no Bara; Lady Oscar: All Rights Reserved Ikeda Productions 1972-1973, Tokyo Movie Shinsha Co. 1979-1980.
|