Prelude a la Fuite
Disclaimer: Ils ne sont pas a moi, c'est
bien dommage, mais ils ne s'en seraient peut-être pas remis aussi
facilement... Comme d'habitude, je ne fait aucun profit (enfin, financier...).
Ce n'est pas grand-chose, c'est même une pièce
minimale, mais je me devais d'expliquer le début de "La Fuite".
Je ne sais toujours pas pourquoi j'ai voulu le justifier de cette façon!
Comme d'habitude, ce n'est pas du tout ce que j'avais
l'intention d'ecrire et je m'excuse si cela est tres different de l'oeuvre
originale et si l'idee vous choque...
Pour Morgane... parce qu'effectivement,
ca en valait la peine...
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"- Vous... c'était vous!
Je le savais, cette belle inconnue, au bal, l'autre soir... Oh, Oscar,
il y a des gestes qui ne sauraient mentir!
- Allez vous en, je vous en
prie!"
La jeune femme s'était
levée d'un bond, se moquant bien de la table qu'elle avait laisse
choir, brisant a sa suite le verre en mille morceaux. Elle s'enfuit
en courant, croisant dans sa hâte un André éberlué,
et bientôt suivie du jeune Suédois qui se précipitait
derrière elle.
Elle atteint le jardin sans
difficulté et s'affaissa contre le tronc d'un arbre, se moquant
bien a présent des larmes qui tombaient sans répit de ses
yeux emplis de douleur. Fersen l'avait suivie et s'approcha doucement
d'elle. La surprise de la découverte et la réalisation
de ce qu'elle représentait l'avait presque anéanti.
Il la regardait, debout a deux pas d'elle, et se contentait de répéter:
"- Oscar, si j'avais su... si
j'avais compris plus tôt qui vous étiez, et les sentiments
que vous me portiez... alors...alors tout aurait été diffèrent.
Vous êtes et vous resterez toujours ma meilleure et plus tendre amie...
- Taisez vous, fit elle en
se retournant, le feu aux joues et la colère surmontant sa peine,
taisez-vous donc, vous savez bien que je n'ai pas le droit... que je n'ai
pas le droit d'aimer. Oh, si vous saviez combien je m'en veux d'avoir
eu cet instant de faiblesse. Allez-vous en, Monsieur. Vous
voyez bien qu'il n'y a pas d'amour."
Mais il l'avait prise par les
épaules et l'avait rapprochée de lui. Ses yeux se perdaient
dans les yeux d'azur, et Oscar pouvait sentir son haleine contre son front.
"- Mais vous avez tort, Oscar,
je refuse de croire qu'en ce monde, il n'y a pas d'amour. Pourquoi
souffririons-nous, alors? Je le vois dans vos yeux, Oscar.
- Changez donc d'horizons,
Monsieur de Fersen, vous verrez d'autres yeux! fit celle-ci d'une
voix acerbe.
- J'ai bien essaye, et cela
durant des années. Mais il y a des yeux qui vous retiennent,
comme la flamme le papillon. Vous ne sauriez ignorer cela.
Je sais que vous aussi, vous avez un coeur."
Oscar avait baisse les yeux
et essayait de se soustraire de l'étreinte puissante du jeune homme,
mais il gardait son corps tout contre le sien. Lorsqu'elle leva le
regard, elle ne vit que douleur et compréhension.
"- Je souffre, dit-il enfin
tout bas. Aidez-moi a oublier ma peine."
Oscar sentit ces mots s'imprimer
comme des lettres de feu sur son coeur. Pourtant, sentir son souffle
sur son visage. Elle oublia de le repousser lorsqu'il posa des lèvres
de velours contre les siennes.
La douceur d'un baiser a peine
esquisse, le goût de lèvres étrangères aux siennes,
mais qu'elle connaissait si bien... Elle se coula dans ses bras,
et pour un court instant, plus rien ne pouvait l'atteindre. Elle
se sentit enfin acceptée toute entière.
Après quelques mots doux,
le gentilhomme Suédois relâcha son étreinte, et, après
une promesse rapide, marcha vers la sortie du jardin sans se retourner.
Oscar se dirigea, ses larmes
séchées, a l'intérieur de la demeure des Jarjayes,
rentra dans le salon et commença a ramasser les morceaux de verre,
repoussant l'aide d'André qui continua de la regarder d'un oeil
critique, avant d'aller rejoindre sa propre chambre.
******
Oscar n'avait pu dormir, mais se
réveilla pourtant a l'aube, enfila une chemise, une culotte de lin
noire et l'assortit d'un manteau couleur bouteille. Lorsqu'elle se
prit a s'examiner d'un air critique dans le miroir, elle se blâma
pour ses efforts, mais son coeur battait vite, si vite...
Elle avait congé de Versailles,
ce jour-la, et elle pouvait compter sur l'efficacité du Comte de
Girodelle pour mener a bien une journée de routine: il n'y
avait guère qu'un exercice a mener, nulle parade, ni autre événement
prévu a la Cour qui aurait nécessité sa présence.
En outre, elle s'était plainte a André que son cheval boitait
et qu'elle suspectait le fer de se démettre. Il devait déjà
être a sa tache lorsqu'elle descendit l'escalier, après avoir
salue Grand-mère, qui se montrait comme a son habitude trop bavarde,
et pénétra dans le carrosse qu'elle avait arrange la veille.
Lorsque l'équipage s'ébranla,
elle eut une courte pensée de panique: Pourquoi faisait-elle
cela? Mais la vision de l'homme qu'elle aimait, qu'elle avait promis
de rejoindre, le souvenir de ses lèvres, balaya tous ses doutes
et elle se perdit dans ses pensées, remarquant a moitié le
paysage défilant a sa fenêtre.
Ils approchaient enfin de l'adresse
que le jeune-homme lui avait donne. Elle savait d'emblée que
c'était une chambre modeste, et la vision du quartier dans lequel
son carrosse pénétrait, confirma ses pensées.
C'était un endroit fort agite et bruyant, ou nombre d'équipages
passaient, et, bien que modeste, ce devait être une banlieue aisée
de Paris, comme pouvaient en témoigner les vitrines affriolantes
et très avenantes des marchands. Elle fit signe au cocher
de s'arrêter a un coin de rue, descendit a la hâte de l'attelage
et indiqua qu'il faudrait venir la quérir vers Cinq heures du Soir.
Le cocher acquiesça, puis intima a ses bêtes l'ordre de reprendre
la route.
Oscar passa plusieurs étalages
sans regarder a droite ni a gauche. Vêtue d'un long manteau
noir, elle ressemblait a un oiseau funèbre au milieu de cette populace
joyeuse et bariolée. Oscar fut heureuse que la, au moins,
le vent de la révolte et de la pauvreté ne semblait pas encore
souffler. Elle arriva devant la pension indiquée et frappa
a la porte.
La logeuse, une femme entre
deux âges et vêtue d'une robe qui avait du être a la
mode mais semblait maintenant fanée, vint se placer droit devant
elle, et demanda, d'une voix forte et avec un accent prononce: "- Qu'est-ce
que vous voulez donc? Je n'ai plus de chambre. Peut-être
dans la Pension "des Pervenches", au bout de la rue, mais ici, on est complet!"
L'aspect incongru d'Oscar n'avait
visiblement pas prise sur cette bonne-femme qui avait du en voir a Paris.
Elle s'était retournée et s'apprêtait a fermer la porte
aussi rapidement lorsqu'Oscar lui annonça d'une voix qu'elle voulait
douce, mais ferme:
"- Je viens voir Mr de Fersen.
J'ose penser qu'il vous a annonce ma visite?"
L'attitude de la logeuse changea
du tout au tout. Elle regarda la jeune femme de la tête au
pieds, avant de lancer avec un petit sourire en coin:
"- Et bien, il m'avait dit qu'une
jeune dame de ses amies viendrait le voir et que je devrais le prévenir,
mais vous, vous ressemblez plutôt..." Mais elle ne continua
pas sa phrase en voyant Oscar qui avait alors rougit violemment.
Elle lui fit signe d'entrer, fit quelque pas dans le corridor qui était
d'ailleurs très bien meuble, la pension semblant une bien meilleure
maison que son extérieur modeste ne le laissait supposer, avant
de se planter vers une porte au fond du couloir et de frapper.
Elle n'attendit pas la réponse
et revint près d'Oscar.
"- Voila, ce sont les appartements
de Monsieur le Comte, fit-elle, visiblement satisfaite. Il est bien
a l'intérieur. Moi, j'ai d'autres choses a faire. Bien
le bonjour!"
Et elle laissa Oscar plantée
devant la porte fermée pour s'engouffrer dans une autre pièce
près de l'entrée de la Pension.
L'attente d'Oscar fut d'ailleurs
de très courte durée.
La porte s'ouvrit doucement,
comme si l'occupant tenait a observer qui se trouvait a l'extérieur.
Puis elle fut grande ouverte, et Oscar passa Mr de Fersen avec rapidité.
Lorsque la porte fut fermée, le silence s'imposa, nul n'osant regarder
l'autre. Avant que la gène ne gagne son paroxysme, Oscar avait
déjà levé la tête et déclara, brisant
le silence pesant:
"- Je dois vous le dire, je
ne sais plus a présent pourquoi j'ai accepte de venir, mais je suis
sure que vous ne m'en voudrez pas car il est toujours agréable de
revoir un ami..."
Mais Axel Von Fersen était
revenu au centre de la pièce et la regardait intensément.
"- Ainsi vous êtes venue
voir un ami. Je vous en prie, laissez-moi donc vous débarrasser
de cet encombrant manteau.. par cette chaleur. Je suis désolé,
j'en oublie toute civilité. Veuillez vous asseoir, Oscar.
Ce logis est peut-être modeste, mais il a l'avantage d'être
peu cher et assez sur, ce qui est assez rare de nos jours dans Paris.
Et puis il est assez proche pour que je puisse me rendre a Versailles.
"- Cet appartement est meuble
avec goût, ne vous en faites donc pas", fit Oscar en retirant l'épais
vêtement sombre.
Débarrassée de
cette épaisseur, sa taille fine se dessinait en clair-obscur devant
la petite fenêtre du salon. Fersen s'était empresse d'accrocher
le vêtement au porte-manteau, et semblait l'observer avec plus d'intensité.
Il se rapprocha d'elle et lui prit la main. Elle se dégagea
presque violemment.
"- Je vous en prie, fit-il avec
un petit sourire triste, je voulais seulement vous guider dans ma chambre,
ou j'ai une table qui fera bien l'affaire: j'ai en effet une bouteille
de vin que je me devais d'ouvrir entre amis. C'est un cadeau de ma soeur.
- Je m'excuse d'avoir réagi
de la sorte, je suis un peu tendue. Mais je suis certaine que ce
vin saura me détendre.
- A la bonne heure. Voila,
nous y sommes, venez donc vous asseoir ici, je vais chercher les verres."
Mais Oscar ne le regardait plus.
Elle fixait l' ameublement plus limite de cette pièce, et l'objet
central. Un lit massif. Elle se sentit soudain morose en pensant
a Fersen, seul, nuit après nuit, dans ce lit immense et froid.
Lorsqu'il réapparut avec la bouteille d'une main, et deux verres
de l'autre, elle se sentit presque soulagée.
Le vin était délicieux.
Ils discutèrent de tout, des troupes d'Oscar a la famille de Fersen
en Suede. Oscar s'enivrait un peu de la présence si proche
du beau gentilhomme Suédois, et lui se sentait perdu dans l'immensité
des yeux de son interlocutrice. La bouteille fut finie et leur main
se joignaient, sur la table. Il ne vint pas a l'esprit d'Oscar de
la retirer, a ce moment la. Lorsqu'enfin le jeune homme approcha
son visage du sien, elle n'attendait plus que la chaleur de ses lèvres
sur les siennes.
Le baiser se fit plus impérieux,
cette fois, les lèvres plus pressantes. Lorsqu'elle sentit
une langue curieuse s'insinuer entre ses lèvres, elle était
trop ivre de bonheur pour résister et le ballet de leurs langues
commença. Une sensation étrange pour Oscar qui suivait
d'instinct le jeune Suédois, mais la passion la poussait a rendre
chaque attaque, a écarter ses lèvres plus, et les mains de
Fersen, qui étaient passées de ses avant-bras jusqu'a ses
épaules, glissaient maintenant jusqu'a sa taille, et elle-même
sentait ses mains explorer sur l'étoffe, le torse du Comte.
Enfin, ils se séparèrent,
rouges de passion, a bout de souffle. Ce fut Oscar qui recouvra ses
esprits la première:
"- Voyons, je ne peux trahir
la Reine...
- Alors nous la trahirons ensemble,
puisqu'aujourd'hui encore vous m'aimez, et que je vous aimerai."
Il lui prit une nouvelle fois
la main et se leva, l'entraînant avec lui, et ils couvrirent les
quelques pas qui les séparaient du grand lit triste qui dominait
la pièce. Fersen la dirigea vers le bas du lit, et la fit
asseoir. Il vint se placer a ses cotes et lentement, dans un même
geste, ils s'allongèrent.
******
Lorsqu'Oscar s'éveilla,
un présentiment de malheur l'enveloppa. Sa tête lui
faisait un peu mal, elle avait du boire plus que de raison, mais elle regardait
ce corps, étendu sur elle, et qui était inanimé, les
traits du jeune Suédois adoucis par le sommeil, avec un mélange
d'extase et d'horreur. Extase de se sentir femme, comme le trahissait
la vague douleur de la partie le plus intime de son corps, la réalisation
de sa féminité, et l'horreur non seulement de l'acte qu'elle
venait de commettre (Quelle faiblesse de s'être ainsi laissée
aller de la sorte!) et la réalisation que c'était aussi la
dernière fois qu'elle pourrait voir le jeune homme.
Comment gommer ces instants
de plaisir de sa mémoire, a chaque fois qu'elle verrait son visage,
entendrait sa voix? Comment pourrait-elle le voir, et continuer son
service auprès de la Reine?
Le plus troublant, pourtant,
n'était pas le fait qu'elle eut enfin embrasse sa condition de femme,
mais c'était le fait qu'elle ne se sentait pas mieux pour autant.
"J'ai fait une erreur.
A Dieu ne plaise de me faire souffrir en conséquence."
Délicatement, elle détacha
le bras qui encerclait encore sa taille et poussa le torse puissant de
Fersen, qui se retourna alors sans s'éveiller. Elle sortit
alors du lit aussi doucement qu'elle put, ramassa ses vêtements épars
et entreprit de se rhabiller dans le salon. Lorsqu'elle fut vêtue
même de son imposant manteau noir, elle retourna voir le jeune homme
assoupi, se rapprocha du lit et glissa un baiser rapide sur son front.
"- Adieu, dit-elle, je sais
que nous ne nous reverrons plus. Nous ne pouvons désormais
jamais nous revoir. Je me suis trompée. J'avais cru
que vous aimer suffisait, mais je sais maintenant que j'ai fait erreur.
Peut-être ne vous aimai-je pas assez, mais je garderai a jamais le
souvenir brillant de cet instant unique ou vous avez fait de moi une femme."
Elle avait parle d'une voix
douce et paisible, autant pour elle que pour lui puisqu'elle ne voulait
pas le réveiller, et elle le regarda une dernière fois d'un
oeil tendre, avant d'ouvrir la porte sur le corridor et sur le monde.
Il comprendrait. Elle l'avait lu dans ses yeux.
******
Oscar repensait a cet apres-midi
qui avait change son destin, en attendant les résultats du Docteur
Lassonne. Il s'était passe beaucoup de temps depuis ce jour
précieux et maudit, et elle avait revu Fersen, mais, en vrai Gentilhomme,
il n'avait jamais reparle de ce moment fameux.
Pourquoi pensait-elle a ceci,
alors que maintenant se jouait sa vie. Elle se savait une morte en
sursis. Cette toux qui n'en finissait pas, ce sang, SON sang, qui
lui échappait. Elle n'était pas naïve, elle savait
qu'on en mourrait, mais elle se devait de gagner du temps. Il y avait
tellement de choses qu'elle n'avait pas faites!
Lorsque le docteur lui confirma
d'une voix grave que c'était bien la tuberculose, elle pâlit
malgré elle, mais se reprit aussitôt:
"- Très bien, Docteur.
Je m'en doutais, aussi ne vous demanderai-je qu'une chose... combien de
temps me reste -t-il?"
Le docteur était un homme
bon, et la nouvelle l'avait fortement ébranlé. Devant
cette femme de glace, il se sentit minuscule.
"- Cela dépend de votre
état... Si vous preniez du repos, partiez au soleil dans une de
vos provinces, nul doute que vous vous sentiriez déjà mieux,
mais a ce rythme... quelques mois, peut-être plus. Mademoiselle
Oscar, il faut m'écouter! Il faut vous soigner!"
Mais ses prières ne furent
pas entendues. Elle avait déjà quitte la pièce.
******
Mai 1788
Oscar:
Aujourd'hui, j'ai compris que
ma vie allait se finir. Non pas par un éclat, mais par une
défaite. Ce corps qui m'a trahie si souvent, même si
c'était avec délice, va me trahir encore. Que me reste-t-il
donc a faire que d'accepter mon sort et ma nature?
J'ai bien croise les amants
des nuits folles de Versailles. Je comprends a présent ce
besoin pour les plaisirs sans lendemain, puisqu'il se peut bien que je
n'aie pas de lendemain. Les papillons d'un soir. Qui suis-je,
présent, pour les juger? Je ne suis plus que l'ombre de moi-même,
et eux, ils vibrent chaque soir, ils semblent si vivants, avec leurs corps,
a défaut du coeur, qui palpitent!
Je souffre en silence, je sais
aussi que je fais souffrir ceux que j'aime autour de moi. Avant de
me plonger dans mon dernier bol de vie, je vous prie de me pardonner, tous.
Et toi, André, tu me laisses faire. Tu me connais pourtant
mieux que personne. Je ne sais pas si je dois te remercier pour cela...
Mais ta chaleur est encore la seule qui réchauffe mon coeur fatigue
par la maladie.
Peut-être est-ce vrai,
et que je n'aie plus qu'une issue: la fuite?
Fin
Berusaiyu no Bara; Lady Oscar: All Rights Reserved Ikeda Productions 1972-1973, Tokyo Movie Shinsha Co. 1979-1980.
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