Petite Vignette Inconsequente
Disclaimer: Pas a moi, pas de profit, mais je pense toujours que j'y gagne quand-meme!
Un interlude court et
frais... Apparemment, Oscar connaît bien et apprécie
beaucoup ses terres d'Arras. Elle a du y passer beaucoup de temps
au cours de sa jeunesse. Ceci n'est que le récit d'une minute
tendre lors de l'une de ces visites...
Pour Laura. Ce n'est peut-etre pas ce que tu attendais...
******
Oscar regardait d'un air absent
son compagnon démolir a belles dents l'épaule de boeuf dont
il ne restait déjà plus que quelques bouchées.
Elle essayait de ne plus penser a Versailles, mais la vision de la Dauphine
restait présent dans son esprit. Certes, Marie-Antoinette
avait déjà, a peine son arrivée, fait preuve d'un
solide caractère et de noblesse d'esprit, s'opposant d'emblée
a Mme du Barry, mais Oscar se demandait jusqu'ou cet affrontement pourrait
mener. Après tout, la comtesse ne reculerait sans doute devant
rien pour maintenir son influence, et Oscar se demandait si la Dauphine
pourrait inlassablement parer ses attaques.
Une voix amusée interrompit
le fil de ses pensées:
"-Eh bien, et moi qui croyait
que j'étais un rêveur! A quoi penses-tu donc?
- Certainement a plus de choses
que le contenu de mon assiette, André! fit-elle d'un ton agace.
- Ouh la, je ne savais pas
que j'avais touche un nerf! Je m'excuse, Oscar, mais je suis affame
après un tel voyage, et puis, je croyais que nous étions
venus a Arras pour nous détendre un peu, après toutes ces
histoires a Versailles...
- Justement, c'est bien ce
qui me chiffonne. Je ne sais pas si cela était une bonne idée
de nous absenter alors que la Dauphine pourrait avoir besoin de mes services.
- Pourtant, je croyais bien
que tu rechignais a être le garde du corps "d'une fille", si je me
souviens bien?"
Un regard glace l'arrêta
net. André connaissait bien trop sa compagne pour se laisser
aller sur une pente décidément glissante. Aussi
entreprit-il de la dérider:
"- Tu sais bien que sa Majesté
lui-même t'a donne ce congé. Il s'attend a ce que tu
reviennes au mieux de ta capacité, alors je e conseillerais plutôt
de te détendre. Mange, tu verras, c'est très bon...
et je suis sur que c'est encore meilleur... (petit regard inquiet sur l'assiette
de sa compagne)... très froid!"
Oscar esquissa un sourire, puis
leva sa fourchette.
"- Très bien, puisque
nous sommes ici... tu as sans doute raison, même si je me fais du
souci, je ne peux rien y faire... Mais jamais je ne pourrai égaler
tant de gloutonnerie!"
André la regarda avec
un franc sourire. Il savait bien qu'Oscar aimait a le provoquer de
la sorte, mais, somme toute, il préférait une Oscar taquine
plutôt qu'une Oscar maussade, et il encaissa en silence.
L'auberge était animée
en ce Dimanche soir, pleine surtout de petits commerçants ambulants
qui venaient d'animer le Marche de la fin de semaine et qui s'apprêtaient
a repartir chez eux le lendemain a l'aube. L'ambiance était
bonne enfant, et Oscar se prit a parler a Antoine, l'aubergiste, après
dîner, autour d'un verre de vin. Elle savait déjà
qu'il n'y avait plus de chambre disponibles, mais elle avait envoyé
André se renseigner autour du village. Attendant son retour,
elle discutait de tout et de rien avec le tenancier, et fut ravi d'apprendre
l'intérêt des gens du village pour le Dauphin et la Dauphine,
signe de grandes choses a
venir, selon tous les marchands
rassembles a l'auberge ce soir-la. Elle commandait un autre verre
lorsqu'elle aperçut un grand homme d'aspect rude au fond du trinquet.
L'homme lui jeta un coup d'oeil de même, et fit quelques pas pour
la rejoindre. Il s'agissait du fermier Auguste, qui tenait une ferme
a l'orée du village, et c'était toujours le premier a voir
Oscar et André arriver en ville.
Oscar n'avait jamais trop parle
a Auguste, mais l'homme, bien que rustre en apparence, avait un air doux
et éveillé, et elle ne doutait pas qu'il fut un homme bon.
Elle lui fit un petit geste de s'asseoir, et un autre a Antoine de lui
apporter un verre supplémentaire.
"- Merci bien, Mr de Jarjayes,
fit Auguste avec un accent épais. C'est bien gentil de votre
part, mais je ne vais pas trop m'attarder car la Martine va être
furieuse si je rentre tard et sentant le vin!
- Je vous en prie, ce n'est
qu'un verre, je ne veux pas vous retenir, fit Oscar d'une voix aimable.
Je voulais juste me présenter, puisque je vous vois a chaque visite,
mais que je n'ai que rarement l'occasion de vous adresser quelques mots.
- Oh, y'avait pas besoin de
vous présenter, Monsieur, ici, tout le monde vous connaît.
Et vous apprécie aussi, d'ailleurs, ca, c'est plus rare..."
Il eut un petit regard gêné.
Visiblement, il appréciait le franc-parler des campagnes.
Cela enchanta Oscar qui le rassura.
"- Ne vous en faites pas, je
préfère la franchise!..."
Elle allait continuer lorsqu'Andre
rentra et s'arrêta devant leur table. Ils avaient les joues
roses de ceux qui ont couru, mais une mine un peu déconfite.
"- Et bien Oscar, tu ne croiras
jamais cela, mais il n'y plus de chambre, ni a l'auberge, ni chez les hôtes,
même chez Servantine, et personne n'a plus de chambre a louer!
- En effet, voila qui est bien
ennuyeux", fit Oscar avec un air soucieux.
Mais le paysan Auguste les regardait
tous les deux a tour de rôle, et il avait du décider qu'ils
étaient bien inoffensifs, car il posa sa grande paluche sur l'épaule
d'André en se levant:
"- Et bien voila, comme ca,
vous aurez l'occasion de discuter avec moi, et avec la Martine! Elle
va être enchantée que je lui ramène de tels invites!
Comme ca, je peux finir ce verre!"
Et l'affaire était désormais
close. Auguste se rassit, attrapa son verre et commença a
boire. André regardait Oscar avec un air ahuri et celle-ci
lui rendit un regard qui avait l'air de dire: "fais-moi confiance!
Je te l'avais bien dit!". André s'assit et commanda un verre.
Une bouteille plus tard, ce
qui ressemblait a un verre, dans l'opinion d'Auguste, ils s'acheminaient
a pied vers la ferme. Ce n'était pas très loin, et
la nuit était douce. C'était une belle nuit d'été,
ou les oiseaux ne connaissaient pas de repos et ou les grillons chantaient
sous la voûte étoilée. La lune rendait un magnifique
croissant lumineux sur la campagne tranquille, et le spectacle paisible
semblait vouloir vous réconcilier avec la Paix.
La ferme était de taille
modeste, mais semblait prospère. Une lanterne brûlait
toujours dehors, sans doute la fermière Martine connaissait les
habitudes nocturnes de son mari. Auguste poussa la porte et fut reçu
par une volée sonore:
"- Eh bien, ou etais-tu donc
passe? Non, ne me dis pas, je sais bien ou tu étais!
- Silence, femme, je suis en
retard pour une bonne raison, je te ramène du monde!"
Cela sembla arrêter la
fermière. Oscar et André avaient maintenant passe le
pas de la porte et se trouvaient dans une sorte d'entrée qui faisait
sans doute office de cuisine, a en juger par la cheminée et les
fourneaux. Martine se trouvait près d'une large porte qui
menait sans doute a la salle principale ou aux chambres. C'était
une femme d'un certain poids, au visage rougi, ce qui laissait penser qu'elle
devait s'adonner, elle aussi, au plaisir de la bouteille qu'elle reprochait
a son mari, mais elle avait un air simple et jovial, qui la rendait tout
de suite sympathique.
Oscar se présenta:
"- Madame, je suis Oscar François
de Jarjayes, et voici mon ami André Grandier. Je suis très
honorée que vous nous laissiez ainsi entrer dans votre logis.
Votre mari nous a généreusement offert le gîte.
je dois avouer que nous n'avons pas trouver d'autres chambres en ville.
Mais si nous imposons..."
La grosse dame accusa un coup,
puis se rapprocha d'Oscar.
"- Non, non, je ne veux rien
entendre. Des gentilshommes. Nous ne sommes que de modestes
fermiers, mais nous trouverons bien de la place.
- Il n'y a qu'à arranger
la chambre du Colin", et puis voila, se mêla Auguste.
Elle lui jeta un regard foudroyant:
"- On voit bien que c'est pas
toi qui doit la nettoyer, la tanière du Colin!" Puis se tournant,
très cérémonieuse, vers les deux amis qui avaient
déjà du mal a se retenir de rire, "Je cours la nettoyer.
C'est une bonne chambre. Y'a même un grand lit, si ca vous
ennuie pas de partager. Y'a pas trop de place, ici."
Oscar se mit a rougir violemment
tandis qu'Andre palissait. Il demanda, néanmoins, d'une voix
gênée:
"- N'y a-t-il pas un siège,
ou je pourrais dormir sur le sol?
- Mon bon Monsieur, reprit
la Martine, c'est qu'y'a pas d'autre meuble que le lit. On a tout
vendu. Maintenant, on s'en sert comme débarras, de la chambre
du Colin, alors le sol, il est aussi plein de bois, d'outils..."
Oscar avait redresse la tête
quelque peu, l'air un peu résignée, mais André la
regarda et devina son embarras. Prévenant, il décida
qu'il voudrait mieux sacrifier une nuit de sommeil a l'embarras de son
amie. Aussi, il étendit les bras en un geste d'étirement
et regarda Auguste bien dans les yeux:
"- Bon, et bien, je crois que
je vais aller dormir dans la grange. J'ai vu que vous en aviez une
juste devant la maison. Je dors souvent a l'écurie de toute
façon. Je suis désolé, Oscar, j'aurais bien
partage ta chambre, mais je tiens a profiter au mieux du grand air de la
campagne... la nuit est si douce!"
Les deux fermiers eurent l'air
hébété quelques instants, puis ils comprirent qu'il
ne plaisantait pas, et Martine disparut préparer la "chambre du
Colin", alors qu'Auguste cherchait tout de même une couverture a
offrir a André.
Ils restèrent tous les
deux seuls. Oscar s'approcha d'André:
"- Je te remercie de ce geste,
André, mais je suis sure que la grange ne sera pas aussi confortable
que tu l'as dit, fit-elle, ayant compris sa manigance.
- Et bien tu vois, je pense
que tu te trompes! Cela doit être TRES agréable de dormir
dans le foin dans la chaleur de la nuit!"
Jamais il ne voulait laisser
Oscar s'imaginer qu'il redoutait justement le foin qui avait tendance a
s'introduire partout et qui n'était jamais aussi doux qu'on le croyait.
Mais il ne voulait pas qu'elle se sente mal du fait de son sacrifice et
il prit un air enchante a propos des arrangements.
Tous deux avaient laisse leurs
chevaux se faire penser a l'auberge (il semblait y avoir plus de place
pour les montures que pour leurs cavaliers), mais avaient emporte un léger
bagage avec eux.
Finalement, après avoir
reçu sa couverture des mains d'Auguste, André fit ses salutations
et, escorte du fermier, alla pour s'installer dans son gîte pour
la nuit. Martine avait préparé la chambre juste au
coin de la cuisine. C'était e effet une pièce minuscule
et encombrée d'objets incongrus, mais Oscar ne pouvait se plaindre,
car le lit, qui prenait toute la longueur de la pièce, était
de bonne taille et semblait en effet très moelleux. Finalement,
elle remercia le couple de leur générosité, puis ferma
la porte pour se préparer a dormir.
******
Il était bien Minuit
passe. Oscar se tournait et se retournait dans ce grand lit.
Ce n'était pas qu'il fut inconfortable, froid ou même trop
dur, mais elle ne pouvait s'empêcher de penser a la fraîcheur
de Marie-Antoinette, et comment cette vertu ne pourrait que se pervertir
dans un milieu tel que la Cour, ou l'influence venait au plus ruse, plutôt
qu'au méritant.
Finalement, elle se redressa
et regarda autour d'elle. La chambre était bel et bien un
débarras, il n'y avait rien pour éclairer, a part les quelques
rayons de lune qui arrivaient a passer les lourds volets de bois.
Oscar rejeta ses couvertures et posa le pied a terre. Non, elle ne
pouvait pas dormir, et rester dans cette pièce confuse ne lui apporterait
pas la paix. Elle se leva donc et poussa la petite porte. La
ferme était trempée dans la pénombre et elle pouvait
entendre, au loin, les ronflements des fermiers, ou plutôt de la
fermière car elle dominait, en cet état de choses aussi,
son imposant mari. Cela mit un sourire sur ses lèvres.
Avec précaution, elle
ne voulait pas, après tout, buter dans quelque objet qu'elle n'aurait
vu dans cette pénombre, elle se dirigea vers la porte d'entrée.
Il y avait une lourde clef qu'elle tourna très doucement, et, entendant
le déclic de la serrure, après avoir vérifié
que le bruit n'avait dérangé en rien les ronflements réguliers
de ses hôtes, elle se glissa a l'extérieur.
La lune était effectivement
splendide. A trois-quart pleine, elle était luisante, d'une
couleur orangée, qui accompagnait bien la couleur des champs sur
lesquels sa lumière se reflétait. Les étoiles
scintillaient, et le ciel était clair et rendait a la campagne son
sens de l'infini. Oscar se félicita de son idée.
Elle regarda le ciel et sentit son coeur s'apaiser.
Vêtue seulement d'une
courte chemise diaphane, car il faisait trop chaud pour porter une grande
chemise de coton, sa silhouette fine et gracieuse semblait s'élever
vers le ciel. Une douce brise, en rien farouche, mais plutôt
bienvenue après une journée de soleil écrasant, faisait
flotter sa chevelure ou se reflétaient les éclats d'or de
la lune. Elle se dressait, telle une pale statue, dans la cour de
la ferme, forme divine comme le spectacle des astres dans cette nature.
Oscar sentait ses appréhensions
s'envoler, a regarder une telle beauté, et elle se sentait si bien,
seule au monde, au milieu de la nuit.
Mais elle n'était pas
seule au monde. Tapi dans l'ombre, un regard la regardait avec jalousie,
avec désir peut-être, toujours avec adoration. Cette
vision enchanteresse emballait son coeur.
Il avait perçu le malaise
d'Oscar. C'était plus que de la fatigue ou des soucis, c'était
presqu'une peur, un sentiment incontrôlable chez un être qui
se plaisait tant a les contrôler. Alors il était reste,
lui aussi, étendu sur la paille, a penser a cette femme qui faisait
battre son coeur par sa seule proximité. Et il ne pouvait
dormir, sachant qu'elle était incommodée et que lui, André,
n'y pouvait rien. Il regardait ce fantôme de grâce faire
quelques pas. Peut-être allait-elle disparaître, comme
la brise, cette vision d'un instant, qu'il se jugeait pourtant heureux
d'avoir connu.
Mais Oscar n'était pas
allée bien loin. Elle s'était assise sur le rebord
d'un grand abreuvoir vide, pas très loin de la grange, ses jambes
retombant sur le plâtre use, ses longues jambes qu'Andre devinait
souvent, mais qu'il n'avait jamais qu' entr'aperçues. Oscar
resta la, se tenant les mains, regardant tour a tour les champs qui se
détachaient au clair de lune, et les astres brillants qui les éclairaient
de la sorte. Son visage semblait paisible. Elle souriait presque.
Elle resta ainsi longtemps.
Finalement, elle tourna la tête
lorsqu'elle entendit le bruit d'une porte, et aperçut André,
en culotte et chemise, venir la rejoindre. Il ne dit pourtant rien,
et ne fit que s'asseoir auprès d'elle. Elle resta de même
silencieuse.
Ils ne se regardaient même pas. Finalement, André
sentit une main se glisser dans la sienne. Il rougit un peu et baissa
la tête. Ils restèrent ainsi, unis, pour un instant
qui sembla a Oscar une éternité, mais même une éternité
n'aurait été assez pour André.
Finalement, elle retira sa main,
doucement, presque tendrement. Et sans le regarder elle se leva,
et regagna la ferme.
Longtemps après qu'elle
eut disparu, il restait dans la cour une forme dressée, qui regardait
autour de lui ces milles merveilles. Pour un instant, lui aussi
avait senti son coeur s'envoler.
Fin
Berusaiyu no Bara; Lady Oscar: All Rights Reserved Ikeda Productions 1972-1973, Tokyo Movie Shinsha Co. 1979-1980.
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